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Bablon Jonathan

Dessin, installation, sculpture

Saint-Pierre-des-Corps

Affilié URSSAF

bayablom@gmail.com

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Interpellé par les rapides et innombrables mutations qu’a entraînées le progrès fulgurant de l’ingénierie scientifique sur le vivant, Jonathan Bablon crée des fragments de paysages hybrides à l’identité indéfinissable.

Avec méthodologie et précision, Jonathan compose ses peintures et installations en faisant s’imbriquer et fusionner des détails formels empruntés à des mondes contradictoires,  tantôt organiques et naturels, tantôt technologiques et artificiels. Nourris par la définition du Cyborg, théorisée par la philosophe Donna Haraway selon laquelle “nous ne sommes que chimères, hybrides de machines  et  d’organismes”1, les éco-systèmes élaborés par Jonathan Bablon puisent dans l’esthétique singulière de l’imagerie médicale et de la maquette d’architecture.

Fasciné par les schémas anatomiques utilisés à but pédagogique, il révèle dans sa pratique le regard porté par l’humain sur sa propre matérialité et sur celle du monde actuel. Par un jeu d’échelles allant du micro au macroscopique, et par une palette de couleurs stéréotypée, ses œuvres incitent l’imagination à franchir la frontière de la première couche, qu’elle soit épidermique ou géologique. En explorant ainsi l’intérieur des êtres et des paysages, on découvre d’étonnantes ressemblances entre le système biologique et mécanique. 

À  l’ère  de l’hyper-technologisation  de  la  société, les deux en viennent toujours plus à se confondre, se métamorphosant l’un au contact de l’autre, repoussant toujours plus loin les limites de nos perceptions et de nos normes éthiques. C’est ce que semble provoquer le procédé de la “plastination”, inventé par le scientifique Gunther von Hagens en 1977, que l’artiste découvre lors d’une visite de l’exposition itinérante Body Worlds à Londres. Dans la continuité des célèbres Ecorchés d’Honoré Fragonard, l’anatomiste allemand a remplacé les fluides corporels de cadavres par des substances polymères qui figent et conservent l’organisme. L’intérieur de ces corps « plastinés » est alors révélé sous un autre prisme, bousculant les constructions de l’imaginaire anatomique établies jusqu’alors et suscitant la controverse. L’artiste s’inspire ainsi de ces frontières troubles et évolutives entraînées par l’anthropisation pour donner vie à des lieux et des organismes mutants.

Alors que l’humain n’est jamais représenté  explicitement, Jonathan Bablon convoque sa présence à travers l’impact visible de ses actions. Dans une approche spéculative, il explore les possibilités formelles de ce retournement de situation où, tel que l’a affirmé le physicien Etienne Klein en 2018, “c’était comme si le progrès s’était émancipé de nos propres désirs et échappait à toute maîtrise”3.

1- Donna Haraway, Cyborg Manifesto, 2007 [1991], Paris Exils Editeur, p. 31
2- A Paris, l’exposition Our Body est frappée d’interdiction au nom d’une atteinte à la dignité humaine en avril 2009 après deux mois d’ouverture.
3- Différencier progrès et innovation, Etienne Klein, Mardis des Bernardins, Collège des Bernardins, 23/01/2018

Licia Demuro – sept. 2022

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