Pour mieux faire vibrer la lumière sur cette « peau d’émail » qui donne corps à son panthéon formel, elle aime répéter ses volumes. La variété des surfaces obtenues – coulures contrôlées, lissage, granulations, écaillures, moisissures, salpêtre, torchis ou béton banché, aspect gras, velouté de cire – déjoue l’apparente restriction des gammes colorées d’émaux. Mais c’est l’usage du noir qui a toute sa préférence. Il est devenu sa quête, peut-être même sa carte d’identité. Sa matité, son éclat, sa lumière, sa matière guident son travail, le grès révélant au mieux son grain et sa chamotte. Quand on entre ainsi de plain-pied sur ce terrain « à risque » du noir, l’allusion à l’œuvre du grand Pierre Soulages semble alors inévitable. Dans ses dernières œuvres, la céramiste se rapproche des fameux « Noirs-Lumières » du peintre, par la multiplicité des champs métaphoriques qu’elle ouvre pour le regard et pour l’esprit. Charbon, goudron, pétrole, encre de seiche : les noirs de Laurence nous absorbent, incitent à la concentration, à la déférence muette face à une telle capacité à produire de la beauté par toujours plus de soustraction et d’ascèse. Avec elle, le noir n’est décidément plus la couleur de l’ennui, mais celle de l’éloquence.
Texte (extrait) : Frédéric Bodet
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