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Portrait · Jean-Michel Tarallo

Artiste plasticien

Portrait · Jean-Michel Tarallo
Cela fait plus de 30 ans que Jean-Michel Tarallo entretient un dialogue avec les choses. Celles de la vie quotidienne, les choses simples mais aussi les sophistiquées, celles en mouvement et les inanimées. Artiste et designer, il donne accès à un matérialisme spirituel, une révélation du mystère de l’existence dans les objets les plus courants.

Pouvez-vous vous présenter ?

J’ai toujours été intéressé par les objets et plus particulièrement par les automobiles lorsque j’étais enfant. Je voulais dessiner des voitures et c’est ce qui a orienté mon parcours scolaire.

À cette époque, il n’existait pas en France d’école de design spécialisée en automobile. Pour approcher ce domaine, j’ai fait un BTS de mécanique automobile en espérant pouvoir suivre ensuite l’option design automobile à l’Université de Compiègne. J’ai finalement intégré l’ENSAAMA Olivier de Serres (École Nationale Supérieure des Arts Appliqués et des Métiers d’Art) où j’ai suivi le cursus design industriel, option transport, ce qui m’a permis d’apprendre l’histoire de l’art et l’expression plastique, mais aussi de faire quelques stages dans les bureaux de design de Renault et Peugeot.

À la sortie des études en 1993, j’ai travaillé dans une agence spécialisée en architecture d’intérieur et design de mobilier. Le début de ma carrière a été composé de plusieurs autres expériences courtes en design mobilier et design de moto et scooters.

J’ai ensuite travaillé 13 ans chez un équipementier qui réalise des intérieurs automobiles pour les constructeurs. J’y ai créé le studio de design intégré et nous faisons avec mon équipe l’interface entre les designers des constructeurs et les ingénieurs internes sur des sujets d’innovation et de production.

En 2011, j’ai fondé le studio de création ÉTAT de GRÂCE. Mes projets concernent essentiellement l’aménagement intérieur d’appartements et d’hôtels parisiens en intégrant la création du mobilier.

Je suis artiste plasticien depuis 2021 tout en continuant l’architecture d’intérieur et le design en parallèle.

Parlez nous de votre travail.

Mon premier projet artistique était en lien direct avec mon métier de designer que j’ai abordé en m’affranchissant de la fonction, ce qui est inconcevable en design. J’ai conçu une série de chaises et fauteuils sur lesquels on ne peut pas s’asseoir… Ce sont des sculptures/objets minimales réalisées en fil de métal très fin à l’échelle réelle. Cette série ÂMES révèle ce qu’il y a l’intérieur de l’objet et que l’on ne voit pas, mais que l’on reconnaît immédiatement.

La première réalisation est un ensemble de 6 chaises et une table qui symbolisent le moment du repas, le foyer, la maison. Même si on ne peut pas s’en servir, en les voyant, on recrée l’histoire d’un déjeuner. J’ai ensuite réalisé 2 fauteuils et une table basse qui évoquent le moment de détente d’un salon. Ce travail questionne la consommation et l’usage que nous faisons des objets.

Ma deuxième série, NIMBES, a été inspirée par les auréoles qui entourent la tête dans les représentations des dieux, des anges, des saints. Elle est composée d’anciens napperons tendus sur un cerclage métallique. De grands formats, les napperons sont installés verticalement en suspension et s’animent comme des mobiles. Le visiteur rentre alors dans l’œuvre, il y évolue et son aura devient visible, représentée par les napperons. Une pièce de cette série a récemment été exposée au Château de Maillebois, en Eure-et-Loir.

Ma troisième et récente série, DÉ-COUVERTES, évoque le 2 premières phases de la rénovation des bâtiments que sont la démolition et la construction. Pendant la démolition, les couches successives de revêtements et d’isolation sont cassées et les murs sont progressivement mis à nu. C’est à cet instant qu’apparaît l’histoire des lieux. Ensuite, la construction apporte de nouveaux matériaux qui viennent recouvrir les découvertes et les cacher. DÉ-COUVERTES se positionne entre ces deux temporalités, entre deux esthétiques aussi, entre deux modes et entre deux mondes, dans un moment de transition où la découverte dialogue avec le souvenir. J’utilise des papiers peints anciens, des plaques de plâtre BA 13 et des rails métalliques utilisés dans les nouvelles constructions.

Ces trois séries bien que très différentes ont en commun de faire appel à la mémoire collective via des objets du quotidien. Travailler à la redécouverte des objets et de leur histoire est une dimension qui m’intéresse particulièrement, car elle me permet de révéler des dimensions cachées et oubliée avec une forme de nostalgie et de spiritualité. Cette approche par séries me permet d’explorer de nouveaux sujets qui sont chaque fois de petites aventures.

Quel est votre lien avec devenir·art ?

Je connais devenir·art grâce à Lucile Hitier, responsable du Centre d’art contemporain L’art[T]senal. J’apprécie son positionnement sur la défense des droits des artistes. Je trouve nécessaire de créer une dynamique locale dans les arts visuels et de rencontrer les autres artistes de la région.